Gladiator, un scène à la loupe

Publié le par Ivan Georgiev

J'ai reçu d'un ami Fred Lorge le dvd special edition de Gladiator de Riddley Scott...

Musique de Hans Zimmer.

La scène : Maximus, le général déchu a succombé a la traîtrise de César (Commode, fils de Marc Aurèle, jaloux de l'amour que celui-ci donna à Maximus plus qu'à lui-même) non sans avoir accompli son but...

Il gît, mourant au centre de l'arène, et son âme rêve déjà aux retrouvailles avec sa femme et son fils.  Thème chanté par une voix de femme (mezzo au timbre naturel et suave) et progression ascendante des violoncelles et altos... Entre nostalgie et douce extase des retrouvailles dans l'au-delà...

"tu es chez toi" murmure Lucilla (fille de Marc Aurèle) qui s'est précipitée quelques instants plus tôt sur le corps encore chaud du héro...

Ecoutez comment le second thème - progressant vers un extrême de lyrisme retenu - va naître dans le court instant de flottement où Lucilla a fait ses adieux et où elle va se relever et proclamer la grandeur de Rome et de son héro. 

1. "Tu es chez toi" :  la tenue sur la tonique de l'accord de dominante (par rapport au thème à venir), en registre moyen crée une attente forte et instable...  Passage du mode majeur qui renforce l'impression d'extase du héro, sûr de rentrer chez lui - au mode mineur : poid de la tristesse pour ceux qui restent maisce thème renforce aussi l'impression de grandeur de la tâche qui reste à accomplir... 

Dernier regard vers le corps maintenant "vidé de son âme" : montée des trois premières notes du thème principal (ré - la sensible, c'est à dire le degré le plus instable et fragile de la gamme, sol , si bémol d'un accord de mi bémol ascendant)...

Elle se détourne et prend appui pour se redresser (mouvement pivotant) : les trois notes se résolvent vers le bas, sur un do : la première phrase s'épanouis à partir du 5ème degré (de cet accord de fa) - appui musical, tel un "déséquilibre solide" au milieu de la gamme, tel le poid du corps qui se redresse en appui sur un pied, mais aussi le poid de la parole qu'elle va proférer... (sans oublier la courte résolution : si, la - pour conclure la triade mineur, donnant une impression de "pivotement"...)

Elle entame le mouvement de rotation vers la foule : trois notes suivantes de la deuxième série dans ce thème, vers le haut elles aussi : do, ré, la - en rotation à partir de la sensible, puisque le même do est ici substitué et fragilisé dans cet accord de ré!   Lucilla fini de tourner - dos à nous, face à la foule : à nouveau résolution de ce thème, mais plus stable cette fois : appui avant de parler à la foule de la grandeur du héro...

"Est-ce que Rome vaut la vie d'un homme de bien?" dit elle dans l'intervale entre ces deux premières phrases musicales et leur développement... très exactement sur la tonique de l'accord, elle ouvre la bouche!  Prise de position et note fondamentale de l'accord.

La symbiose se poursuit ainsi jusqu'à la fin de la scène, qui dure environ 1:30 - sans parler de la façon dont le thème est amené dans la scène précédante par sa contrepartie "féminine"...

Bon assez parlé pour ne rien dire!  Venez plutôt voir la scène avec moi, ce sera plus facile à montrer ; plus facile de pointer du doigt ces vides et ces pleins, ... et puis même si l'analyse reste creuse, à la fois, il est amusant de voir comment l'émotion se renforce par le simple jeu (vide) de cette mécanique (formelle)...  Vide et forme indissociable, comme toujours?

Au plaisir - ... et apportez de quoi grignoter!  Cette version longue dure 3 heures!

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